Je vais beaucoup mieux depuis que je suis traitée pour ma maladie de Lyme.
Tellement mieux que j’ai attaqué avec enthousiasme le grand ménage dans la maison. Depuis bien 4 ans que je n’avais pas pu le faire, ça n’était pas du luxe. Et quel bonheur de me sentir vivre à nouveau !
Un tel bonheur que j’en ai un peu oublié qu’on ne guérit jamais de Lyme et qu’il faut se ménager. J’ai trop tiré sur la corde et la corde a rompu.
La semaine dernière a donc été dure, très dure.
Je sors tout juste d’un « BUG de LYME ».
Quand on est malade de Lyme, la douleur, la fatigue et l’esprit embrumé sont nos compagnes habituelles de route. On fait avec.
Mais régulièrement, on subit des crises particulièrement difficiles à endurer. Tous les symptômes sont amplifiés. C’est Lyme x 10, ça vous tombe dessus d’un coup et tout s’arrête. C’est ce que j’appelle « le Bug de Lyme ».
Ces crises arrivent sans crier gare, toutes les 4 semaines environ (une histoire de renouvellement de cellules et de bactéries qui meurent), à la suite d’un effort trop puissant (style passer l’aspirateur !), quand on n’a pas assez dormi (- de 9 h !), mais surtout, et c’est là la pire de toutes, quand on prend des antibiotiques pour lutter contre la maladie. En fait, quand les Borrélioses (les bactéries) meurent en nombres, elles libèrent une masse de toxines qui empoisonnent le sang et le cerveau. C’est bon signe : le traitement fonctionne, les sales bêtes crèvent. Mais peut-être allez-vous en crever aussi.... On appelle ça une réaction d’Herx et c’est tout sauf une partie de plaisir.
Tout d’abord, une chape de plomb s'abat sur vous. L’épuisement est si profond que vous devez vous coucher immédiatement. Vous ne tenez plus debout. Comme le lapin de Duracell, vous n’avez plus de batterie et vous vous arrêtez d’un coup.
Ensuite votre dos devient dur comme du marbre. Les muscles sont tendus et extrêmement douloureux, à tel point que vous ne supportez pas le moindre contact, alors adieu le massage qui vous soulage tant en temps normal. Au moindre mouvement, les muscles semblent prêts à rompre. Alors vous ne bougez plus, de toute façon vous n’en avez plus la force.
La pétrification commence par le cou, puis s’étend progressivement jusqu'au bas du dos.
Quelques heures plus tard vous avez l’impression que la pierre a éclaté, votre corps est en pièces, broyé, des pieds à la tête. Alors il prend feu. Chaque centimètre de votre peau s’embrase, pendant qu’à l’intérieur, vous gelez. Vous grelotez, claquez des dents comme si vous étiez nue sur la banquise, rien ne peut vous réchauffer.
Tous vos tendons sont en feu, eux aussi. Vos tendinites reviennent en force, toutes en même temps : hanches, genoux, épaules, coudes, poignets... La fidèle sciatique vous poignarde.
Quand vous respirez, vos côtes et je ne sais quoi qui habite votre dos et votre poitrine, craquent comme si elles se rompaient. Ce n’est pas spécialement douloureux, mais plutôt impressionnant, comme une poêlée de pop-corns qui éclatent.
Les omoplates et les clavicules sont démantibulées, le cou bloqué, les reins ravagés et les vertèbres se font la malle en tous sens. La mâchoire est si coincée que vous ne pouvez plus ouvrir la bouche et vous avez l’impression de dormir sur une pierre. Pourtant vous avez un super oreiller ultra moelleux et ergonomique qui vous a coûté la peau du fion.
Votre cerveau n’est plus qu’une masse informe de purée en décomposition. Quel jour sommes-nous ? Quelle année ? Qui ? Quoi ? Bleu ? Vous ne pouvez plus parler, ne trouvez plus les mots les plus simples. Vous ne pouvez plus aligner 3 mots, former des phrases. Sujet/ verbe/ complément ? Trop compliqué. Additionner 6 + 8 ? 68 ? Assoiffée, vous vous desséchez, mais n’avez pas l’idée de demander à boire. Vous n’avez même pas la force d’appeler.
Vous êtes si faible que votre respiration se fait lente, si lente... votre poitrine se soulève à peine, parfois, vous vous obligez à respirer, allez, encore un effort, une de plus, soulève, soulève... Parfois vous vous surprenez à observer votre souffle si léger et à espérer qu’il s’arrête, totalement, définitivement, quel bonheur.....si léger... si léger.......
Puis 2,3,8,( jusqu'à 10 jours après !) vous vous relevez, vous retrouvez des forces, même si les douleurs sont toujours là, impitoyables. Vous ne savez plus marcher. Vos pieds ne peuvent pas se mettre à plat sur le sol. Vous marchez sur la pointe ou sur le côté des pieds, le dos voûté comme une Mémé. Vos jambes partent dans tous les sens, vos mouvements ne sont plus coordonnés, vous ne maîtrisez plus grand chose....
Quelques jours plus tard, vous reprenez votre train-train par la force des choses, mais votre cerveau est toujours embrumé. La moindre tâche est une montagne : passer un coup de fil, essayer de travailler un peu, s’occuper des paperasses, faire de toutes petites courses, étendre le linge (en plusieurs fois).... une montagne effrayante !
Vous n’arrivez plus à écrire. A la main impossible de maîtriser le mouvement du crayon. Au clavier toutes les lettres s’emmêlent.
Il faut bien aller chercher les enfants à l’école, vos jambes flageolent à l’idée de conduire. Tremblante, vous réussissez à sortir la voiture du garage, en vous démontant le cou, qui est toujours bloqué, pour ne pas vous prendre le mur. Puis vous partez doucement pour voir si tout va bien au niveau des pédales. Et au rond point c’est la panique ! Vous ne savez plus dans quel sens vous devez le prendre, vous vous attendez à trouver une voiture en face et ne savez plus que faire. Vous arrivez à sortir du rond point et vous vous garez sur le bord de la route le temps d’être bien sûre du côté où vous devez rouler. L’épreuve allez-retour prend 6 minutes, mais vous vous en souviendrez toute votre vie.
Peu à peu la vie reprend son cours, les symptômes s’amenuisent pour revenir au niveau habituel, celui auquel vous serrez les dents et faites comme si de rien n’était, pour ne pas gêner.
Et puis un jour vous faites quelques pas dans le bois, près de la maison, il y a des fleurs partout, le soleil brille et tout est merveilleux. Après ce que vous avez vécu, vous voyez tout d’un oeil nouveau. Vous êtes DEBOUT, vous marchez. Vous êtes VIVANTE, vous respirez l’air frais. Vos yeux se posent sur mille beautés : une fleur, une goutte de rosée un rayon de soleil entre les branches. Vous êtes près de ceux que vous aimez et vous les trouvez formidables. Le chant des oiseaux vous berce, accompagné du murmure du ruisseau et vous vous dites que LA VIE EST BELLE, vraiment belle.