lundi 22 juillet 2013

Le " Bug de Lyme "


Je vais beaucoup mieux depuis que je suis traitée pour ma maladie de Lyme.
Tellement mieux que j’ai attaqué avec enthousiasme le grand ménage dans la maison. Depuis bien 4 ans que je n’avais pas pu le faire, ça n’était pas du luxe. Et quel bonheur de me sentir vivre à nouveau !
Un tel bonheur que j’en ai un peu oublié qu’on ne guérit jamais de Lyme et qu’il faut se ménager. J’ai trop tiré sur la corde et la corde a rompu. 

La semaine dernière a donc été dure, très dure. 
Je sors tout juste d’un « BUG de LYME ».

Quand on est malade de Lyme, la douleur, la fatigue et l’esprit embrumé sont nos compagnes habituelles de route. On fait avec.
Mais régulièrement, on subit des crises particulièrement difficiles à endurer. Tous les symptômes sont amplifiés. C’est Lyme x 10, ça vous tombe dessus d’un coup et tout s’arrête. C’est ce que j’appelle « le Bug de Lyme ».

Ces crises arrivent sans crier gare, toutes les 4 semaines environ (une histoire de renouvellement de cellules et de bactéries qui meurent), à la suite d’un effort trop puissant (style passer l’aspirateur !), quand on n’a pas assez dormi (- de 9 h !), mais surtout, et c’est là la pire de toutes, quand on prend des antibiotiques pour lutter contre la maladie. En fait, quand les Borrélioses (les bactéries) meurent en nombres, elles libèrent une masse de toxines qui empoisonnent le sang et le cerveau. C’est bon signe : le traitement fonctionne, les sales bêtes crèvent. Mais peut-être allez-vous en crever aussi.... On appelle ça une réaction d’Herx et c’est tout sauf une partie de plaisir.

Tout d’abord, une chape de plomb s'abat sur vous. L’épuisement est si profond que vous devez vous coucher immédiatement. Vous ne tenez plus debout. Comme le lapin de Duracell, vous n’avez plus de batterie et vous vous arrêtez d’un coup.
Ensuite votre dos devient dur comme du marbre. Les muscles sont tendus et extrêmement douloureux, à tel point que vous ne supportez pas le moindre contact, alors adieu le massage qui vous soulage tant en temps normal. Au moindre mouvement, les muscles semblent prêts à rompre. Alors vous ne bougez plus, de toute façon vous n’en avez plus la force.

La pétrification commence par le cou, puis s’étend progressivement jusqu'au bas du dos.

Quelques heures plus tard vous avez l’impression que la pierre a éclaté, votre corps est en pièces, broyé, des pieds à la tête. Alors il prend feu. Chaque centimètre de votre peau s’embrase, pendant qu’à l’intérieur, vous gelez. Vous grelotez, claquez des dents comme si vous étiez nue sur la banquise, rien ne peut vous réchauffer. 

Tous vos tendons sont en feu, eux aussi. Vos tendinites reviennent en force, toutes en même temps : hanches, genoux, épaules, coudes, poignets... La fidèle sciatique vous poignarde.

Quand vous respirez, vos côtes et je ne sais quoi qui habite votre dos et votre poitrine, craquent comme si elles se rompaient. Ce n’est pas spécialement douloureux, mais plutôt impressionnant, comme une poêlée de pop-corns qui éclatent.


Les omoplates et les clavicules sont démantibulées, le cou bloqué, les reins ravagés et les vertèbres se font la malle en tous sens. La mâchoire est si coincée que vous ne pouvez plus ouvrir la bouche et vous avez l’impression de dormir sur une pierre. Pourtant vous avez un super oreiller ultra moelleux et ergonomique qui vous a coûté la peau du fion.

Votre cerveau n’est plus qu’une masse informe de purée en décomposition. Quel jour sommes-nous ? Quelle année ? Qui ? Quoi ? Bleu ? Vous ne pouvez plus parler, ne trouvez plus les mots les plus simples. Vous ne pouvez plus aligner 3 mots, former des phrases. Sujet/ verbe/ complément ? Trop compliqué. Additionner 6 + 8 ? 68 ? Assoiffée, vous vous desséchez, mais n’avez pas l’idée de demander à boire. Vous n’avez même pas la force d’appeler.

Vous êtes si faible que votre respiration se fait lente, si lente... votre poitrine se soulève à peine, parfois, vous vous obligez à respirer, allez, encore un effort, une de plus, soulève, soulève... Parfois vous vous surprenez à observer votre souffle si léger et à espérer qu’il s’arrête, totalement, définitivement, quel bonheur.....si léger... si léger.......

Puis 2,3,8,( jusqu'à 10 jours après !) vous vous relevez, vous retrouvez des forces, même si les douleurs sont toujours là, impitoyables. Vous ne savez plus marcher. Vos pieds ne peuvent pas se mettre à plat sur le sol. Vous marchez sur la pointe ou sur le côté des pieds, le dos voûté comme une Mémé. Vos jambes partent dans tous les sens, vos mouvements ne sont plus coordonnés, vous ne maîtrisez plus grand chose....

Quelques jours plus tard, vous reprenez votre train-train par la force des choses, mais votre cerveau est toujours embrumé. La moindre tâche est une montagne : passer un coup de fil, essayer de travailler un peu, s’occuper des paperasses, faire de toutes petites courses, étendre le linge (en plusieurs fois).... une montagne effrayante !
Vous n’arrivez plus à écrire. A la main impossible de maîtriser le mouvement du crayon. Au clavier toutes les lettres s’emmêlent.

Il faut bien aller chercher les enfants à l’école, vos jambes flageolent à l’idée de conduire. Tremblante, vous réussissez à sortir la voiture du garage, en vous démontant le cou, qui est toujours bloqué, pour ne pas vous prendre le mur. Puis vous partez doucement pour voir si tout va bien au niveau des pédales. Et au rond point c’est la panique ! Vous ne savez plus dans quel sens vous devez le prendre, vous vous attendez à trouver une voiture en face et ne savez plus que faire. Vous arrivez à sortir du rond point et vous vous garez sur le bord de la route le temps d’être bien sûre du côté où vous devez rouler. L’épreuve allez-retour prend 6 minutes, mais vous vous en souviendrez toute votre vie.

Peu à peu la vie reprend son cours, les symptômes s’amenuisent pour revenir au niveau habituel, celui auquel vous serrez les dents et faites comme si de rien n’était, pour ne pas gêner.

Et puis un jour vous faites quelques pas dans le bois, près de la maison, il y a des fleurs partout, le soleil brille et tout est merveilleux. Après ce que vous avez vécu, vous voyez tout d’un oeil nouveau. Vous êtes DEBOUT, vous marchez. Vous êtes VIVANTE, vous respirez l’air frais. Vos yeux se posent sur mille beautés : une fleur, une goutte de rosée un rayon de soleil entre les branches. Vous êtes près de ceux que vous aimez et vous les trouvez formidables. Le chant des oiseaux vous berce, accompagné du murmure du ruisseau et vous vous dites que LA VIE EST BELLE, vraiment belle.

Parce que j'ai compris qu'il fallait enfin en parler....


Depuis 6 ans je suis malade sans trop le dire. Je n’aime pas me plaindre et je trouve ça particulièrement inutile ; ça ne peut que pourrir la vie de ceux qui vous entourent et la vôtre étant déjà pourrie, pas la peine d’en rajouter.
Et puis il faut l’avouer, personne n’aime entendre se plaindre le gens malades. Les gens malades, c’est ennuyeux, ça vous met le moral à zéro, c’est gavant. Surtout quand c’est une maladie invisible, qu’on ne connaît pas, qu’on ne comprend pas. Comme toutes les personnes atteintes de Lyme, fibromyalgie, sclérose en plaque, fatigue chronique etc... je me suis souvent dis que j’aurais presque préféré un bon cancer, ma foi.

Avec l’étiquette «cancer» collée sur ton front, au moins, tout le monde sait ce que tu as. Au pire on ne te connaît plus, bien souvent on te plaint, au mieux, on te tend la main.
Avec les maladies émergentes, encore mal connues, mal soignées, le problème c’est qu’on ne sait pas trop ce que ça engendre comme difficultés quotidiennes pour les personnes atteintes. Il y a des hauts et des bas, mais ça ne se voit pas. Quand on voit ces personnes, elles vont bien - et pour cause : quand elles vont mal, elles sont clouées au lit ou, tout du moins, elles restent chez elles ! - donc elles vont toujours bien.

Le pire, c’est quand on n’a pas encore mis d’étiquette, de nom sur la maladie.
Personne ne te prend au sérieux. Tu es très certainement devenue fainéant(e), gnognote et tu en rajoutes forcément un peu... au final, c’est dans ta tête que ça se passe, puisque sur les radios, il n’y a rien.

Alors je me suis muré dans mon silence, dans ma solitude, j’ai fuis la société et j’ai serré les dents.

J’avais tort. Mon mari me le dis souvent. Il faut dire quand ça ne va pas, dire ce que tu ressens, dire pourquoi. Sinon les gens ne comprennent pas. 
Ma maladie ne se voit pas, donc elle n’existe pas. 
Alors je vais expliquer. Et si ça vous fait chier, tant pis. C’est vrai c’est pas drôle, mais c’est ce que je vis. Au moins je serai chiante mais pas fainéante.

Depuis quelques mois, donc, je dis. Pour me défendre, mais surtout parce que j’ai pris conscience que si j’ai vécu cette galère, ces 6 ans d'errance et d’abandon, c’est parce que personne ne connaît cette saloperie de maladie, pas même la plupart des médecins qui préféraient tenter de m'assommer de médicaments pour me faire taire plutôt que de chercher ce que j’avais.
ET SI PERSONNE NE LA CONNAIT, IL FAUT ABSOLUMENT EN PARLER !!!
Voilà pourquoi je poste ici mon témoignage sur ma vie avec Lyme au quotidien.
Parce que cela pourra peut-être aider certains à enfin poser un diagnostic sur leur mal. 
Et parce que je ne souhaite cette merde à personne, alors il faut prévenir !

Et des solutions, il en existe. Peut-être pas pour guérir, mais tout du moins pour soulager, vivre à peu près normalement. REVIVRE.
J'ai eu la chance que beaucoup n'ont pas eue. J'ai rencontré un médecin extraordinaire, un bon, un vrai. L'homme par lui même est déjà formidable : humain, curieux, intéressé, vif d'esprit, dynamique. Quand il ne sait pas il cherche. Et il a beaucoup cherché. Il a fait des recherches sur les plantes, au Mexique, il se tient au courant de toutes les dernières avancées en médecine, il est vraiment passionné par son métier, et par dessus tout il a un coeur en or et on le ressent immédiatement. Lui est là pour vous soigner, pas pour encaisser votre chèque le plus rapidement possible pour pouvoir passer au suivant.

La première consultation a duré plus d'1h30. Je n'avais jamais vu ça. Et il le fallait bien pour que je puisse lui expliquer ce qui m'arrivait, la chronologie, les symptômes etc... Il a tout de suite diagnostiqué une fibromyalgie. Enfin ! Enfin un nom sur mon calvaire. Et il a pris les choses en main.Tout de suite. Il m'a mise au régime Seignalet. Terrible pour moi au début. Plus de gluten, plus de lait, plus de sucre. Sacrifice. Mais ce régime réduit l'acidité et l'inflammation chronique, donc soulage très efficacement les douleurs. Et bien d'autres effets quasi miraculeux que je développerais plus tard. Il a rajouté tout un protocole à base de plantes, magnésium à haute dose etc.... Au bout d'une semaine je commençais à ressusciter. Cet homme et ce régime m'ont sauvé la vie. Au fil des mois j'ai retrouvé une bonne partie de mon énergie, les crises se sont espacées et surtout les douleurs ont grandement diminué. J'ai récupéré à 60 % mes capacités.

Ce n'est qu'un an plus tard que mon homéopathe a fait des recherches sur la maladie de Lyme. Elle a tout de suite pensé à moi. Elle m'a fait remplir un questionnaire, cocher sur une liste impressionnante les symptômes que j'avais. Je les avais quasiment tous, une bonne trentaine. Une prise de sang a révélé que j'avais des anticorps de la borréliose. La bactérie était là depuis des années et me rongeait. C'était la cause de ma fibromyalgie (la fibromyalgie est un ensemble de symptômes rarement expliqués).
Nous avons entrepris un long traitement sur 9 mois, il fallait passer par toutes sortes d'antibiotiques pour cibler chaque forme que la bactérie avait prise en mutant, au fil du temps, en s'infiltrant dans les différents organes, le cerveau...etc.. Un antibio pour chaque cible. Et tout un protocole complexe pour accompagner. Et, bien entendu, l'aide extraordinaire et indispensable d'un bon ostéopathe et homéopathe, ainsi que des séances d'acupuncture pour relancer le métabolisme et retrouver l'énergie disparue.

Depuis je vais mieux, beaucoup mieux, même si le traitement m'a souvent paru pire que le mal, il est parfois si puissant, si violent...

Aujourd'hui je suis infiniment reconnaissante envers ces deux médecins qui m'ont sauvée et je me dis que c'est une chance inouïe que j'ai eu de tomber enfin en de si bonnes mains. Quand je vois sur les forums de malades fibromyalgiques ou malades de Lyme jusqu'où peut aller la descente aux enfers : fauteuil roulant, paralysie, dépendance totale, abrutissement par les médicaments et même euthanasie.... je me dis que je me dois de témoigner qu'en sortir est possible. Qu'il ne faut surtout pas se laisser piéger par les médicaments habituellement proposés (antidouleurs, antidépresseurs) qui servent uniquement et volontairement à assommer le patient pour avoir la paix.

Il faut se battre et changer de médecin. La solution existe mais elle est ailleurs.

La prévention :
  • porter des bottes, des pantalons et des manches longs lors de vos balades en forêt ou dans les herbes hautes.
  • vérifier la présence de tiques sur tout votre corps et ceux de vos proches dès votre retour.
  • n’enlever les tiques qu’avec un crochet à tiques spécialisé. Jamais de produits style éther, alcool... ni l’enlever avec les doigts ! Sinon les tiques régurgitent et c’est à ce moment là qu’elles peuvent vous transmettre les bactéries.
  • vous rendre immédiatement chez le médecin et demander un traitement antibiotique de 28 jours.
  • penser à Lyme si vous avez de douleurs et de fatigue chroniques et inexpliquées.
  • ne pas s’en tenir à l’avis de votre médecin car il y a de fortes chances qu’il n’y connaisse rien, chercher des spécialistes de cette maladie, se renseigner auprès des associations.

Les principaux sites sur Lyme :

Interview du professeur Luc Montagnier, prix noble de médecin et co-découvreur du Sida :

Et pour aller plus loin, l’excellent livre de Judith ALBERTAT :